Aquifères de l’Albien/Néocomien en Normandie (ex-Haute-Normandie)

Les nappes de l’Albien et du Néocomien, majoritairement captives, sont des nappes qui couvrent les deux tiers du Bassin Parisien.

Cet article présente le contexte hydrogéologique de l’Albien et du Néocomien en territoire haut-normand plus spécifiquement.

Les études réalisées à l’échelle du territoire haut-normand dans le cadre du classement en ZRE et les rapports techniques sont présentés succinctement.

Les spécificités de la nappe de l’Albien en Haute-Normandie

Les sables verts de l’Albien s’étendent sous presque tout le territoire et disparaissent progressivement vers le sud-ouest.

Une nappe majoritairement captive

Ils forment, à l’affleurement, une frange entourant le cœur de l’anticlinal de Bray. En s’éloignant de l’axe anticlinal, les couches plongent sous les terrains plus récents. La nappe devient alors progressivement captive sous les argiles du Gault.

L’épaisseur de ces couches diminue rapidement au sud-ouest d’une ligne reliant le Havre, Bernay et Verneuil. Dans le Lieuvin et l’ouest du Pays d’Ouche, les sables verts sont réduits à quelques lentilles dans des argiles. Dans le département de l’Eure, la nappe des sables verts n’est puissante qu’au nord et à l’est du département.

L’exploitation de la nappe dans le secteur de Rouen

Le relèvement des couches vers le nord-ouest amène les terrains albiens à l’affleurement au pied des reliefs qui dominent l’embouchure de la Seine. Ils sont présents directement sous les alluvions   de la baie de la Seine et de la basse vallée de la Risle.

L’anticlinal de Vernon amène ces couches au contact des alluvions   de la Seine, ce qui permet l’exploitation locale de la nappe des sables verts par des forages peu profonds. A Rouen, par le jeu de la faille de la Seine, les terrains albien sont peu profonds, aussi de nombreux forages alimentaient autrefois les industries. La corrosion et l’ensablement des ouvrages ont conduit à leur abandon.
Les forages industriels creusés à Pont Audemer et Vernon captent un mélange d’eaux de la craie  , des alluvions   et des sables verts, ce qui leur confère un faciès chimique particulier.

Dans le cadre du réseau piézométrique régional, deux piézomètres font l’objet d’un suivi de la nappe de l’Albien en Haute-Normandie :

  • le piézomètre 01511X0188 situé sur la commune de Saint-Marcel
  • le piézomètre 01234X0297 situé sur la commune de Caudebec-lès-Elbeuf

Un aquifère   profond sur une grande partie de la Haute-Normandie

En dehors du pourtour du pays de Bray, de l’anticlinal de Vernon et de l’embouchure de la Seine, l’aquifère   de l’Albien est profond de plusieurs centaines de mètres. Il n’est connu que dans les sondages de reconnaissance pétrolière ou dans quelques forages anciens.

L’écoulement de la nappe en Haute-Normandie

L’Atlas des eaux souterraines de la France (BRGM, 1970-1972) a dressé une carte piézométrique   de la nappe de l’Albien pour la Haute-Normandie. Cette carte fait également apparaitre les zones d’affleurement des sables vert ainsi que les limites occidentales de ces formations.

Carte piézométrique de la nappe de l’Albien pour la Haute-Normandie (Atlas des eaux souterraines de la France (BRGM, 1970-1972))

A l’échelle du Bassin Parisien, deux cartes sont disponibles :

La carte de 1997 montre que la nappe de l’Albien en Haute-Normandie est alimentée uniquement par les affleurements du pays de Bray au nord et par la nappe du Cénomanien au sud (dans ce secteur l’Argile   du Gault est peu épaisse), avec des lignes de courant qui convergent vers l’exutoire de la Seine.

Notons en effet que le creux piézométrique   de Paris lié aux prélèvements a supprimé les apports venant de l’Est du bassin.

L’illustration ci-dessous montre en effet qu’avant 1930, des écoulements est-ouest semblaient exister au sein des sables verts du Bassin Parisien. Depuis 1841 et le premier forage   à l’Albien, il faut souligner une importante modification de la piézométrie à cause de l’exploitation intense de l’aquifère   de l’Albien en région parisienne : un cône de dépression piézométrique   est en effet apparu au centre du Bassin Parisien, avec un minimum à + 20 mètres.

Cartes piézométriques avant 1830 (en haut) et en 1999 (en bas) obtenues par krigeage (Raoult, 1999)

Le potentiel aquifère   de la nappe en Haute-Normandie

Le rapport BRGM/86-SGN-664-HNO présente les possibilités de production d’eau pour l’AEP à partir des aquifères profonds de Haute-Normandie : sables Albiens, calcaires du Portlandien, calcaires du Kimméridgien, Sables de Glos et calcaires coralligènes de l’Oxfordien et calcaires du dogger.

Ce rapport conclut que les sables de l’Albien sont hétérogènes mais que des productions avoisinant les 90m3/h peuvent être obtenus en Haute-Normandie au nord de la Seine.

Dans l’Eure, la puissance de la série (qui remonte vers la surface du sol au sud du département) diminue et les productions se réduisent à des valeurs de 30 à 40 m3/h.

Par contre, dans le Bec-de-Caux, les sables deviennent argileux et paraissent inexploitables.

Données géologiques et hydrogéologiques des sables de l’Albien/Néocomien (Ph. De la Quérière, BRGM/86-SGN-664-HNO)

Enfin, deux références bibliographiques complètent les connaissances de la nappe de l’Albien en Haute-Normandie :

  • L’ouvrage Aquifère   et eaux souterraines en France (Roux J.-C., 2005) comporte un chapitre (chapitre n°21) rédigé par Jacques Lauverjat, qui présente une synthèse à l’échelle du bassin sur l’aquifère   de l’Albien-Néocomien comportant de nombreuses cartes sur les thèmes suivant : cadre géograhpique et géologique, paramètres hydrodynamiques, piézométrie, datation des eaux, qualité des eaux, exploitation de la nappe, gestion de la ressource,….
  • La thèse de Rose-Marie Chevrier de 1972 (CNAM) : Elle constitue une étude hydrogéologique et hydrogéochimique des nappes aquifères du Pays de Bray. R-M. Chevrier a réalisé différentes cartes piézométriques et géochimiques de la boutonnières de Bray. Cette thèse a en particulier étudié l’alimentation de la nappe des sables verts de l’Albien dans ce secteur. Elle conclut que la nappe des sables verts de l’Albien est alimentée, dans le paux de Bray, par les venues souterraines des eaux portlandiennes en charge sous le Barrémien. Les infiltrations, dûes aux précipitation atmosphériques et au ruissellement des eaux issues de la craie  , sont effectives mais moins importantes, semble-t-il que les apports du Portlandien. Un exemplaire de cette thèse et ses cartes associées, est consultable au BRGM Haute-Normandie.

Une réserve stratégique pour l’eau potable

La profondeur de ces aquifères augmente des bordures du Bassin Parisien vers le centre pour atteindre jusqu’à –1000 m en Seine-et-Marne  . Ces nappes sont donc particulièrement bien protégées des pollutions de surface au centre du bassin et sont par conséquent, de très bonne qualité. Leurs réserves potentielles sont très élevées mais le renouvellement par l’alimentation naturelle est très faible et le temps de séjour moyen de plusieurs milliers d’années.
Cette ressource constitue donc une réserve stratégique d’eau potable à l’échelle du bassin Seine-Normandie : elle est considérée comme une ressource ultime pour l’alimentation en eau potable en cas de crise majeure dans le Schéma Directeur d’Aménagement et de Gestion des Eaux (SDAGE) du bassin Seine-Normandie. En complément au dispositif de gestion du SDAGE, la nappe de l’Albien-Néocomien est classée en Zone de Répartition des Eaux   (ZRE). Son exploitation pour l’eau potable est donc contrôlée et limitée pour préserver la ressource en quantité suffisante en cas de crise.

Classement de cette ressource en ZRE

Dans le cadre du décret de septembre 2003 relatif à l’extension des Zones de Répartition des Eaux (Z.R.E.) de l’Albien-Néocomien, la DIREN Haute-Normandie avait sollicité le BRGM Haute-Normandie, dans le cadre de ses missions d’appui à la police de l’eau, dans le but de vérifier la cohérence des côtes NGF retenues pour le toit de l’Albien par la DIREN de bassin (modèle de l’Albien réalisé par Hydroexpert).

Le travail a consisté à définir pour chacune des communes de Haute-Normandie (hors boutonnières de Bray), les côtes extrêmes du toit de l’Albien. Ces côtes extrêmes fournies peuvent aider les services de police de l’eau à identifier les projets de forages susceptibles d’atteindre la Z.R.E.

Le second volet de ce travail a consisté en l’inventaire des points d’eau existants à l’Albien déclarés au titre du code minier. Une liste (non exhaustive) de 198 points d’eau susceptibles d’atteindre l’aquifère   de l’Albien-Néocomien a été dressée : 73 dans le département de l’Eure et 125 dans le département de Seine-Maritime.

Ce travail a fait l’objet de 2 rapports téléchargeables ci-après : BRGM/RP-53781-FR de mars 2005 et BRGM/RP-53156-FR de mai 2004.

Le rapport de BRGM/RP-53156-FR de mai 2004 faisait suite et actualisait le rapport BRGM/RR-38342-FR de mars 1995. Ce dernier avait réalisé un premier inventaire des captages d’alimentation en eau potable ou industriels prélevant dans la formation de l’Albien et avait estimé les volumes prélevés dans cette nappe en Haute-Normandie. Ce rapport concluait à une estimation des prélèvements dans les aquifères profonds (Oxfordien à Albien) de la Haute-Normandie de l’ordre de 3 Mm3/an (données 1991).

Un rapport d’aide à l’identification en forage   de cette ressource stratégique

Ce rapport (BRGM/RP-55338-FR) réalisé par le BRGM Haute-Normandie en janvier 2007, dans le cadre de ses missions d’appui à la police de l’eau, a consisté en un travail méthodologique d’identification et de caractérisation des faciès des formations géologiques à la transition Albien-Cénomanien en Haute-Normandie, dans le cadre du classement de cet aquifère   en Zone de répartition des Eaux   (ZRE).

Dans la première partie, ce rapport propose une définition et une description précise de ces formations (succession d’unités lithostratigraphiques, repères stratigraphiques, caractéristiques faciologiques, relations entre formations géologiques et horizons aquifères, …). Le toit de l’aquifère   de l’Albien/Néocomien est constitué par la formation des Argiles du Gault, barrière imperméable permettant d’individualiser l’aquifère   de la craie   et l’aquifère   de l’Albien/Néocomien. C’est par conséquent cette formation qui ne doit pas être traversée dans le cadre d’une recherche en eau.
Le BRGM propose dans ce rapport une synthèse des caractéristiques faciologiques de ces formations (tableau 1 du rapport).

Dans le dernier paragraphe de ce rapport, le BRGM a rédigé un cahier des charges que les services de l’état peuvent demander de respecter au moment de la déclaration de travaux (rubrique 1.1.1.0). Le programme de ce cahier des charges permet, pour les forages ayant un risque d’atteinte de cette ressource, de justifier l’atteinte ou non de l’aquifère   albo-aptien.

Pour en savoir plus :

Revenir en haut