Programme National de Bancarisation des Installations Classées et Sites potentiellement Pollués (ICSP)

En application de la Directive européenne Cadre sur les Eaux (DCE, 2000/60/CE) et de la Directive fille   sur la Protection des Eaux Souterraines (DPES, 2006/118/CE), l’état chimique des différentes masses d’eau doit faire l’objet d’études spécifiques. Ainsi les informations relatives aux Installations Classées pour la Protection de l’Environnement (ICPE) et aux pollutions éventuellement associées sont prises en compte lors de la mise en place des différents programmes nationaux de surveillance des eaux superficielles ou souterraines. Parmi les outils à disposition des acteurs chargés de la protection des eaux souterraines et de la prévention contre les pollutions, on trouve la Banque d’Accès aux Données des Eaux Souterraines (ADES), qui est notamment alimentée par le biais d’un programme national de Bancarisation des données relatives à la qualité des eaux souterraines au droits des Installations Classées et Sites potentiellement Pollués (ICSP).

Illustration : Usine sidérurgique, une industrie émettrice de CO2 (Pays-Bas, 2007). Copyright : © ErikdeGraaf - Fotolia

Contexte national et objectif

On compte en 2015 près de 6000 sites industriels inscrits dans la Base de données BASOL sur les sites et sols pollués (ou potentiellement pollués) appelant une action des pouvoirs publics, à titre préventif ou curatif. Parmi ces sites plus de 3500 disposent d’une surveillance des eaux souterraines.

A ces sites BASOL   il faut ajouter les installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) en fonctionnement qui sont susceptibles, compte tenu des procédés industriels et des produits manipulés, de polluer les eaux souterraines. La surveillance des eaux souterraines, requise par le dispositif réglementaire en place (article 65 de l’arrêté ministériel du 2 février 1998 modifié), constitue alors une mesure de gestion complémentaire aux mesures de prévention des pollutions habituelles : en 2012, 2000 sites étaient recensés.

L’ensemble des données de surveillance des eaux souterraines réalisées par les exploitants de sites ICPE dont la surveillance des eaux souterraines est requise est transmis à l’inspection des installations classées dans un format variable d’un site à l’autre : rapport de bureau d’étude, bordereaux de laboratoires d’analyses, tableaux de synthèse au format papier ou numérique…

Afin de tenir compte de l’évolution des règlementations sur la protection des eaux souterraines et le principe de transparence et d’accessibilité aux données environnementales (convention Aarhus), le Ministère en charge de l’Ecologie et du Développement durable a souhaité mettre en place des actions spécifiques permettant la bancarisation de ces données dans un format compatible SANDRE et leur mise à disposition sur un site internet public : ADES  .

Sur la base des expériences menées entre 1993 et 2003 en Alsace, Lorraine et Champagne-Ardenne par le BRGM (en partenariat avec les DREAL régionales et les Agences de l’Eau Rhin-Meuse et Seine-Normandie), une méthodologie et un programme national régionalisé de bancarisation et de valorisation des données historiques relatives à la qualité des eaux souterraines au droits des ICPE ont été mis en œuvre par le BRGM. La circulaire ministérielle BPSPR/2007-257/LC du 5 novembre 2007 a précisé le contexte et les modalités de cette action nationale. Le projet ICSP (sigle désignant les Installations Classées et Sites Pollués ou potentiellement pollués suivis par les services d’inspection de la DREAL, DRIEE ou DEAL) a donc été lancé, intégrant la bancarisation d’une part importante des ICPE dont la surveillance des eaux souterraines est requise.

Le programme national de bancarisation des données sur le suivi de la qualité des eaux souterraines autour des ICSP sur l’ensemble du territoire a principalement pour objectif de :

  • verser les données des résultats de la surveillance de la qualité des eaux souterraines dans la banque de données nationale sur les eaux souterraines, ADES   au travers d’outils de saisie adaptés dans le cadre de bases régionales ;
  • et d’optimiser le suivi de l’évolution dans le temps de la qualité des aquifères en aval des sites et assurer le contrôle opérationnel de la surveillance de la qualité des masses d’eaux souterraines, en liaison avec les objectifs des directives européennes sur les eaux.

En parallèle, le BRGM a développé pour le compte de l’OFB (ex-ONEMA) et des Agences de l’Eau un outil de télétransmission (portail de collecte) concernant les eaux souterraines dans l’application GIDAF (Gestion Informatisée des Données d’Autosurveillance Fréquente) (Outil informatique de transmission des données de surveillance des émissions dans l’eau).

Répartition par région du nombre de sites ICSP bancarisés sous ADES à fin 2012 (D’après KOCH-MATHIAN J.Y., CHERY L., GUIET F., 2013)


Répartition par bassin du nombre de sites bancarisés sous ADES (ADES le 16/04/2015)

Bilan national de la bancarisation ICSP

L’action nationale de bancarisation s’est déroulée entre 2006 et 2012 sur les régions métropolitaines et les DROM. Dans 5 régions (Alsace, Champagne-Ardenne, Lorraine, Languedoc-Roussillon, Rhône-Alpes) les actions de bancarisation avaient été initiées avant 2006. Début 2013 (rapport BRGM/RP-62288-FR, 2013), l’ensemble des régions métropolitaines a achevé la bancarisation des données sur le suivi de la qualité des eaux souterraines relatives aux ICSP, la région Alsace étant la seule à mener une mise à jour régulière. Les données bancarisées correspondent en général aux années post 1998 jusqu’aux dates de collecte des dossiers transmis par les industriels à l’administration, variables selon les années de démarrage des projets de bancarisation des données qui se sont étalés sur 6 ans.

Le nombre de sites ICSP concernés par la bancarisation à l’échelle métropolitaine est supérieur à 4000, dont 23% se situent sur le bassin Seine-Normandie.

Bilan de la bancarisation ICSP à l’échelle du Bassin Seine-Normandie

En 2015, le nombre de sites ICSP bancarisés sur le bassin Seine-Normandie est de 966 dont 892 sites disposant d’analyses réalisées sur plus de 14 000 points de surveillance de la qualité des eaux souterraines nommés également « qualitomètres ». L’Ile-de-France et la Champagne-Ardenne arrivent en tête pour le nombre de points de surveillance bancarisés, soit 51% au total des qualitomètres ICSP du bassin Seine-Normandie.

La répartition par région du bassin Seine-Normandie du nombre de site ICSP et du nombre de qualitomètres inventoriés dans le Réseau qualitatif national des eaux souterraines pour le suivi des installations classées est présentée dans le graphe ci-dessous.

Répartition du nombre de site ICSP et du nombre de qualitomètres– partie Seine-Normandie (ADES le 16/04/2015)
Régions du bassin Seine-Normandie Lien vers réseau de mesures régional ICSP sous ADES   Nombre de sites ICSP bancarisés sous ADES   (partie Seine-Normandie) Nombre de qualitomètres bancarisés sous ADES   (partie Seine-Normandie)
Basse-Normandie http://www.ades.eaufrance.fr/FicheReseau.aspx?code=0300000155 69 1582
Haute-Normandie http://www.ades.eaufrance.fr/FicheReseau.aspx?code=0300000156 165 1714
Picardie http://www.ades.eaufrance.fr/FicheReseau.aspx?code=0100000062 107 1546
Ile-de-France http://www.ades.eaufrance.fr/FicheReseau.aspx?code=0300000136 332 4269
Champagne-Ardenne http://www.ades.eaufrance.fr/FicheReseau.aspx?code=0300000135 189 2887
Bourgogne http://www.ades.eaufrance.fr/FicheReseau.aspx?code=0600000239 32 1149
Centre http://www.ades.eaufrance.fr/FicheReseau.aspx?code=0400000193 56 688
Lorraine http://www.ades.eaufrance.fr/FicheReseau.aspx?code=0200000037 16 250

Sur la période 1999-2013, 17 rapports consacrés à l’inventaire et à l’exploitation des données des installations classées situés sur le bassin Seine-Normandie ont été édités par le BRGM dans le cadre d’études pluriannuelles financées par le Ministère, les Agences de l’Eau (notamment l’Agence de l’Eau Seine-Normandie), les DRIEE/DREAL régionales (Basse-Normandie, Haute-Normandie, Picardie, Ile-de-France, Champagne-Ardenne, Bourgogne, Centre, Lorraine) et le BRGM (cf. bibliographie).

Les études les plus récentes ont conduit, en dehors de la saisie et de la mise à disposition sous ADES   des résultats de suivi de la qualité des eaux souterraines en amont et en aval de chaque établissement industriel, à une interprétation des données collectées et bancarisées :

  • par site ICSP (adaptation du programme et du réseau de surveillance, respects des prescriptions réglementaires, dégradations constatées entre l’amont et l’aval, évolution de la qualité au cours du temps, dépassement des critères de qualité, maîtrise des impacts) ;
  • par masse d’eau (répartition géographique des sites, des qualitomètres et des polluants détectées) ;
  • par polluants (étude statistique sur les paramètres recherchés et la fréquence de détection).

Ce programme national, dont le bassin Seine-Normandie fait partie, a ainsi permis :

  • le rattrapage dans toutes les régions des données sur la qualité des eaux souterraines issues de la surveillance des sites ICSP pour les années 2000-2010 essentiellement ;
  • d’avoir rendu accessibles les données via le portail national, aux gestionnaires de sites, aux industriels, et de façon générale à terme, à tous les acteurs du domaine, et de permettre ainsi une connaissance partagée sur les impacts et leurs évolutions dans le temps ;
  • d’avoir une meilleure connaissance des pratiques de l’autosurveillance des sites industriels, afin d’améliorer le cas échéant les réseaux et programmes de suivi mis en place par site ou par groupements de sites (zones industrielles…) ;
  • et de contribuer à répondre aux objectifs de la Directive Cadre sur l’eau et de sa directive fille   concernant le bon état de la qualité des masses d’eau, en aidant notamment à l’évaluation des pressions, à l’identification des rejets ponctuels de substances dans les aquifères concernés et des tendances à la hausse des polluants dans les eaux.

Un bilan de la contamination par substance sur le bassin a été dressé par l’Agence de l’Eau Seine-Normandie en 2012. Les substances étudiées ont été choisies parmi celles mentionnées dans l’arrêté du 17 décembre 2008 en fonction de leur impact sur la qualité des eaux souterraines : métaux lourds (Cd, Ni, Pb, Hg), solvants chlorés (tétrachloroéthylène, trichloroéthylène, chlorure de vinyle, benzène), hydrocarbures aromatiques polycycliques (somme des 6 HAP), indice hydrocarbure, ammonium. L’analyse a montré que les valeurs seuils sont davantage dépassées par l’indice hydrocarbure, le benzène et l’ammonium. Près de la moitié des sites suivis présentent un dépassement en solvants chlorés. Parmi les métaux lourds, le nickel et le plomb présentent les dépassements les plus importants.

Protection de la ressource en eau potable

La synthèse réalisée en 2012 par l’AESN a permis d’évaluer les pressions que peuvent représenter les ICSP vis-à-vis des captages d’alimentation en eau potable (AEP) en fonction de la distance relative entre les deux. 515 sites ICSP ont été identifiés dans un périmètre inférieur à 2 km d’un captage AEP, 232 sites ICSP à moins d’1 km et 133 sites ICSP à moins de 500 m. Ainsi une attention et une vigilance toute particulière devra être accordées aux sites et captages concernés.

Répartition des sites ICSP dans le Bassin Seine-Normandie avec présence d’un captage AEP à moins de 2 km (AESN, 2012)

Perspectives

Les bilans de la bancarisation réalisés à l’échelle du bassin Seine-Normandie (AESN, 2012) et l’échelle nationale (rapport BRGM/RP-62288-FR, 2013) ont mis en évidence des perspectives d’exploitation et de valorisation des données concernant notamment la protection de la ressource en eau potable et l’amélioration des pratiques de surveillance et la caractérisation des milieux par une évaluation « pression/impact » (respects des objectifs de la DCE : mise à jour de l’état des lieux et rapportage).

Depuis la fin du programme national (2012), la mise à jour des données sur ADES   n’est plus assurée, à l’exception d’initiatives locales de certaines DREAL (Alsace, Champagne-Ardenne, Lorraine). Une fois que l’outil de télétransmission concernant le suivi de la qualité des eaux souterraines dans l’application GIDAF sera opérationnel, il conviendra de dresser le bilan concernant les manques de données et les solutions technico-financières à mettre en œuvre pour garantir un rattrapage complet à l’échelle nationale qui garantira une exploitation et une valorisation optimale des données.

Bibliographie
La bibliographie spécifique est consultable sur l’espace Bibliographie du SIGES.

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