Le karst sur le territoire champenois (partie Ouest de l’actuelle région Grand-Est) est bien présent et se développe principalement dans les formations des calcaires du Jurassique (département des Ardennes au Nord et départements de l’Aube et de la Haute-Marne au Sud) et à la base du tertiaire et/ou de la craie à l’ouest du département de la Marne .
- Localisaiton des zones karstiques en Grand-Est (ex-région Champagne-Ardenne)
Les problèmes liés à la présence de karst sont importants dans le domaine de la gestion des ressources en eau (variabilité quantitative ou qualitative, conflits d’usage, vulnérabilité accrue,…) ainsi que dans le domaine des risques naturels (effondrements, remontée de nappe,…).
Cependant au regard des enjeux, la connaissance de ces milieux en Grand-Est, partie Champagne-Ardenne, est assez limitée comparativement aux autres régions du bassin Seine-Normandie, telles que la Normandie et la Bourgogne-Franche-Comté.
Parmi les sources potentielles d’information, on dispose notamment des inventaires d’associations de spéléologie, dont les données ont pour la plupart ont été intégrée à la BDCavités.
Le département de Géographie physique de l’Université de Reims (GEGENA) a mené de son côté des recherches sur la caractérisation du karst de la Montagne de Reims particulièrement intéressante sur le plan géomorphologique.
Sur la base des connaissances acquises et de la gestion « empirique » des ressources en eau karstiques dans les formations du Jurassique par les acteurs concernés, l’AESN et le BRGM ont contribué, ces dernières années, à la synthèse et la diffusion de l’information sur le karst du Tithonien et de l’Oxfordien.
- Carte de localisation des communes concernées par quelques systèmes karstiques remarquables dans les calcaires du Tithonien (HG303) et les calcaires de l’Oxfordien (HG306). D’après CHABART et al. 2018
Karst de la Montagne de Reims (LEJEUNE O., DEVOS A., 2001)
Le karst de la Montagne de Reims est un karst typique des régions de cuestas de l’est de la France :
- C’est un karst de contact lithostratigraphique organisé en front de karstification situé entre deux couches de perméabilité différente qui évolue dans l’espace en fonction de l’état de la couverture ;
- C’est un karst « vert » développé sous couvert forestier (Parc Naturel Régional de la Montagne de Reims) ;
- C’est un karst « étagé », caractérisé par une double karstification, à la fois des sables grésifiés du Thanétien et de la craie du Campanien sous-jacente.
Ce karst présente néanmoins certaines originalités par son site de front de côte, son isolement inhérent aux modalités de la sédimentation paléocène, la nature des roches karstifiées (sables grésifiés et craie ) et par sa dynamique générale caractérisée par une interaction entre la dynamique de versant (mouvements de terrain de type rotationnel) et la dynamique karstique (immunité des replats structuraux).
Karst du Tithonien (Masse d’eau FRHG303)
Le karst du Barrois est l’exemple le plus connu de karst de contact lithostratigraphique à l’échelle du Grand Est, ayant fait l’objet de nombreux travaux de recherche (JAILLET, 2000 ; LEJEUNE, 2005 ; DEVOS, 2010 ; FISTER, 2012). On distingue quatre systèmes karstiques remarquables :
- le système karstique du plateau d’Ancerville (55) avec comme exutoire la Fontaine du Pas Saint Martin (code BSS : BSS003TPHM) et des traçages à partir d’Ancerville (fontaine ou gouffre du Lion, code BSS 02268X1005/CN), de la grotte des Sarrasins (code BSS : 02268X1002/CN)
- le système karstique de Cousances-les-Forges (55) avec comme exutoire la source karstique de la Cousance (code BSS : 02275X0075/SCE), la source de l’Usine et source de la Bézerne (code BSS : 02275X0202/SCE) et l’ancienne station de jaugeage (code BSS : 02275X0094/SJ)
- le système karstique de la Dorma (étagé Hauterivien sur Tithonien) avec comme exutoire la source du Rupt-du-Puits ( code BSS : 02264X0021/HY) sur la commune Robert-Espagne (55)
- le système karstique de Rupt-aux Nonains (55), grand et au fonctionnement complexe, avec plusieurs exutoires (sources du Moulinet, source du Moulin (02275X0025/CN), bouillon de l’Artouze (02275X0088/SCE)…)
- Karst du Barrois : Système karstique du plateau d’ANCERVILLE (55) - Source du Pas Saint-Martin (BSS003TPHM) à CHAMOUILLEY(52)
Le karst de Poissons, situé au niveau de la côte des Bars (lacets de Mélaire), est un paléokarst daté d’environ 400 000 ans, fortement exploité depuis l’époque médiévale jusqu’au début du XXe en raison de la richesse en fer des poches karstiques (gouffre de Poissons, code BSS 02657X0002/AF). Le site de petite surface (1 km2), situé entre les vallées du Rongeant et du Mont (affluents de la Marne ), se trouve dans un contexte géomorphologique très particulier : plateau portlandien sans couverture à proximité de la faille de Poissons. La karstification est un héritage d’une couverture crétacée en recul (haute-surface d’érosion).
- Karst de Poissons (Rapport BRGM-RP-53425 de 2004)
- Karst de Poissons d’après JAILLET (2000 et 2005) : Coupe géologique en travers de la Vallée du Rongeant, du site de Mélaire et du Laiçon
Karst de l’Oxfordien (Masse d’eau FRHG306)
Les calcaires de l’Oxfordien supérieur et du complexe Argovo-Rauracien, bien que n’ayant pas de couverture homogène, développent tout de même une karstification importante sur le plateau du fait d’un gradient hydraulique important ou d’une structure tectonique spécifique. On retiendra notamment les deux exemples suivants :
- le système karstique du Bois de Trampot et du Cul du Cerf avec comme exutoire de la source de la Manoise (code BSS 03025X0030/SO). Il s’agit de la plus grande reculée du Nord-Est de la France, situé en limite des départements de la Meuse et de la Haute-Marne (Cuesta oxfordienne). La couverture est peu importante, mais le gradient hydraulique est élevé (d’après DEVOS (1996), JAILLET (2000), LEJEUNE (2005), MARRE et al. (2009)).
- le système karstique des Dhuits avec comme exutoire la source des Dhuits (code BSS 03353X0029/SAEP1) sur la commune de Montheries (52). Cette source au débit très important donne naissance au ruisseau des Dhuits sur le bassin de la Renne, affluent de l’Aujon. Les eaux proviennent en partie de pertes sur le cours d’eau amont de la Renne et sur le cours d’eau amont de la Blaise (d’après LEJEUNE (2005) ; BOUTON. D., DORMUS. J. (1990) ; PAULIN (1974, 1975, 1976).