Le Dogger, également connu sous le nom de Jurassique moyen, est une formation géologique divisée en quatre étages : la Callonien, le Bathonien, le Bajocien et l’Aalénien. Il correspond à des dépôts anciens (-175 à -154 millions d’année) à dominante calcaire .
Le Dogger constitue le principal aquifère géothermique exploité en région parisienne. Situé entre 1 500 et 2 000 mètres de profondeur, cet aquifère contient une eau d’une température variant de 57 à 85 °C : la nappe du Dogger.
L’eau contenue dans cet aquifère , largement minéralisée (6,5 à 35 g/l), impose la réalisation d’un « doublet » voir d’un « triplet » afin de réinjecter le fluide géothermal dans son réservoir d’origine : ces techniques sont expliquées sur le site Géothermies (Les technologies de géothermie profonde).
Exploitation géothermique du Dogger
En 1969, la réalisation du doublet de Melun permet la première exploitation géothermique au Dogger pour un réseau de chaleur. Cette exploitation marque le développement de la géothermie basse énergie en Ile-de-France. Réhabilité en 1989 puis 1995, le réseau géothermal est toujours en fonctionnement et alimente aujourd’hui plus de 6 000 équivalents logements. Ce réseau et reste un atout pour le développement économique de la ville de Melun (« La Géothermie en France » n°5).
Le premier choc pétrolier de 1973 puis celui de 1979 marque une accélération des projets de géothermie au Dogger afin de s’affranchir des coûts du pétrole. Ainsi en 1981, 25 forages ont été réalisés à des fins d’exploitation géothermiques.
Le contre-choc pétrolier et les problèmes d’exploitation liés aux problèmes de corrosion marquent un arrêt de lancement de nouveaux projets et une fermeture de quelques sites.
Il faut ensuite attendre 2008, année du Grenelle de l’Environnement, avec le programme de relance de la géothermie en Ile-de-France porté par la région pour voir redémarrer de nouveaux projets.
- Bassin Parisien, Usage direct de la chaleur (aquifère du Dogger). Nombre de puits forés depuis 1969 (©BRGM)
En 2014, 36 réseaux de chaleur géothermiques délivrent chauffage et eau chaude sanitaire à environ 200 000 équivalents logements et les projets d’extensions, de réhabilitations et de nouveaux projets ne manquent pas pour les années futures…
Dans ce contexte particulier, il est apparu primordial de développer et de maintenir un outil d’aide à la gestion adapté à l’échelle du champ géothermique destiné aux décideurs pour le suivi des opérations à long terme comme pour la réalisation de nouvelles opérations : la base de données Géothermie au Dogger, devenue SYBASE (Système de bancarisation et de suivi des opérations de géothermie de basse énergie en France métropolitaine) portée par le BRGM et l’ADEME.
Les problèmes liés à l’exploitation
La corrosion et les bactéries
Vers 1985, les premières difficultés liées à la composition chimique du fluide géothermal ont commencé à poser des problèmes aux exploitants : percement des tubages suite à une corrosion localement intense, dépôts à l’intérieur des tubages, modification de la composition du fluide (Fe2+, sulfures) accentuant le développement de bactéries corrosives.
Afin de résoudre ces problèmes techniques, chercheurs et exploitants ont travaillé conjointement afin d’élaborer des programmes de détection et de diagnostics mais aussi pour se doter d’équipements dédiés à la lutte contre ces phénomènes.
Aujourd’hui, les problèmes techniques ont été surmontés grâce à :
- des innovations techniques sur les matériaux en contact avec le fluide géothermal comme les matériaux composites
- une surveillance complète de l’exploitation (instrumentation, analyses…)
- des programmes de maintenance préventive et curative adapté aux conditions d’exploitation
- la mise en place de programmes d’injection d’inhibiteurs de corrosion dès le casing.
Le phénomène de « percée » thermique
Le fluide, lorsqu’il est réinjecté dans l’aquifère est plus froid, à une température d’environ 40 °C alors que le Dogger a une température pouvant dépasser les 80°C à certains endroits. La réinjection a donc pour conséquence de créer une bulle froide aux alentours du puits de réinjection.
Une croissance de cette bulle froide entraine le refroidissement de la ressource ce qui peut remettre en question son exploitation à terme. Ce phénomène s’est accentué ces dernières années en raison de l’augmentation de la densité des nouvelles opérations.
Afin d’anticiper au mieux son arrivée, le BRGM, accompagné de ces partenaires publics et des exploitants, à réaliser une modélisation hydrothermique dans sa partie exploitée pour mieux définir la localisation des futures installations et accompagner la décision des opérateurs.
- Etat initial à T0 de la température de l’eau du Dogger et état à l’année 2010 : évolution des « bulles froides » (© BRGM)
La température du Dogger
La percée thermique devait survenir après 20 ans d’exploitation…Elle attendra !
En 1985, les spécialistes de l’exploitation du Dogger prédisait qu’en 2005, les premières particules froides issues de l’exploitation du réservoir du Dogger se ferait sentir et entrainerait à court terme la fermeture des réseaux de chaleur géothermiques. Ces modélisations, aujourd’hui considérées comme pessimistes, sous-estimaient le rôle des épontes.
30 ans plus tard, les études menées par le Centre Technique montrent que les réseaux de chaleur alimentés par géothermie ont encore de nombreux jours devant eux. En effet, hormis le cas d’Alfortville où une baisse de 3°C a été constatée, la décroissance thermique ne devrait pas se faire sentir avant les années 2028 voire 2040 suivant les simulations.
Ces travaux reposent sur les relevés mensuels de température du réservoir du Dogger effectués par les exploitants de réseaux de chaleur géothermiques d’Ile-de-France et sur des modélisations.